Les bio-géo matériaux

1- L’ivoire de mammouth, archive du comportement des sociétés paléolithiques : analyse et imagerie chimique non invasive par faisceau d’ions

Ce projet franco-allemand combinant chimie analytique et archéologie préhistorique est dédié à l’ivoire de mammouth, matériau d’une grande importance sociale et socio-économique parmi les premières sociétés d’Homo sapiens en Eurasie, durant la phase aurignacienne du Paléolithique supérieur (40-30000 AP). Cet ivoire fut utilisé pour créer des centaines de parures ainsi que les premiers objets tridimensionnels d’art figuratif au monde [1,2]. Au-delà des observations stylistiques, son analyse permettrait de comprendre le savoir-faire et les modes d’approvisionnement de la matière brute des hommes préhistoriques [3,4], la fonction des ivoires aux temps préhistoriques et les phénomènes d’altération. On pourrait aussi différencier des ivoires récents utilisés des ivoires sub-fossiles [5].

Ce programme transdisciplinaire tire profit des derniers développements technologiques réalisés sur l’accélérateur New-AGLAE (C2RMF) afin de :

– élaborer des méthodes d’imagerie quantitatives non invasives des traces organiques pour optimiser la datation de ces objets.

– explorer la répartition des éléments traces sur des échantillons d’ivoire et d’os provenant de différents contextes aurignaciens, notamment du Jura souabe et du sud de la France afin de mieux comprendre les stratégies d’approvisionnement.

– comprendre la diagénèse au fil du temps permettant l’établissement des indicateurs biologiques et géochimiques fiables.

Les premiers résultats ont déjà montré l’efficacité et la faisabilité de l’approche. Les variations du taux de fluor mesuré indiquent des stratégies d’approvisionnement différentes selon les régions des ivoires, qui correspondent à des différences apparentes d’interaction des Homo sapiens avec les mammouths. Les variations des rapports entre éléments traces (Sr, Br, Zn) selon les sites montrent qu’à l’échelle régionale, l’approvisionnement en ivoire peut être tracé par ces éléments [6].

Collaborations : U. Tübingen (D), Museum Ulm (D), Helmholz-Zentrum Dresden-Roosendorf (D), New-AGLAE

[1] Palaeolithic ivory sculptures from Southwestern Germany and the origins of figurative art. N. Conard, Nature 426 (2003) 830-832.

[2] A female figurine from the basal Aurignacian of Hohle Fels Cave in southwestern Germany. N. J. Conard, Nature 459 (2009) 248-52.

[3] Differentiation of archaeological ivory and bone materials by micro-PIXE/PIGE with emphasis on two Upper Palaeolithic key sites: Abri Pataud and Isturitz, France. K. Müller, I. Reiche, J. Archaeol. Sci. 38 (2011) 3234-3243.

[4] Micro-PIXE/PIGE analysis of Palaeolithic mammoth ivory: Is it possible to find characteristic chemical markers of mammoth ivory provenance and relative dating in specimens of great age? C. Heckel, K. Müller, R. White, H. Floss, N. J. Conard, I. Reiche, Palaeogeogr. Palaeoclimatol. Palaeoecol. 416 (2014) 133–141.

5] F-content variation in mammoth ivory from Aurignacian contexts: Preservation, alteration, and implications for ivory-procurement strategies. C. Heckel, K. Müller, R. White, S. Wolf, N. J. Conard, C. Normand, H. Floss, I. Reiche, Quatern. Int. 403 (2016) 40-50.

[6] Combined non-invasive PIXE/PIGE analyses of mammoth ivory from Aurignacian archaeological sites. I. Reiche, C. Heckel , K. Müller , O. Jöris , T. Matthies , N. J. Conard , H. Floss , R. White, Angew. Chem. Int. Ed. 57 (2018) 7428-7432.

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